Rien de tel qu’une bonne délocalisation pour réveiller la combativité des travailleurs-travailleuses ! Imaginez un peu : je délocalise le site des Trimailleurs dans un endroit exotique et bien sûr, nuitamment...
Surpris, les trimailleurs-trimailleuses qui s’endormaient régulièrement sur leurs lauriers au point de ne même pas faire un petit signe de la main, auront beau manifester, tempêter (c’est fou ce qu’on est soudain attaché à son travail quand il est menacé de disparition... ), réclamer, pétitionner, rien n’y fera.
L’administrateur, en bon gestionnaire, sortira les courbes de productivité (qui s’effondrent : trois articles par semaine pour un potentiel de 20 travailleurs-travailleuses), exhibera les courbes de visites (en chute libre, la vitrine n’est pas souvent renouvelée), ne manquera pas de faire remarquer le faible coût de la main-d’oeuvre étrangère (ils seront trop contents d’écrire un petit mot, eux, et même, ils alimenteront en photos, textes originaux ou rigolos, bref, l’usine délocalisée sera bruissante telle une ruche).
Le dégraissage salutaire accompli, l’administrateur saura s’entourer d’une équipe déterminée, choisie par les plus actifs des anciens trimailleurs et, même si la production n’est pas plus importante, du moins aura-t-il l’assurance que ceux qui se nourrissent savent aussi nourrir. Il s’agit de rentrer dans le cercle vertueux du commerce équitable.
En tout cas, les gestionnaires sont formels : si la situation ne se redresse pas d’ici le 15 juin, la délocalisation sera inéluctable et prendra effet au 1° juillet 2006.